par Lamine Chikhi

ALGER, 21 janvier (Reuters) - Trente-sept étrangers sont morts dans la prise d'otages de la semaine dernière dans le complexe gazier de Tiguentourine, à In Amenas, au Sahara algérien, et sept autres sont portés manquants, a annoncé lundi le Premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal.

Vingt-neuf djihadistes ont été tués et trois ont été capturés vivants par l'armée algérienne, a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse à Alger.

Les islamistes à l'origine de la prise d'otages ont menacé de nouvelles attaques les pays soutenant l'intervention française au Mali.

L'occupation du complexe gazier a duré de mercredi matin à samedi après-midi, lorsque les forces spéciales algériennes, qui avaient repris jeudi la "base vie" du site, ont lancé l'assaut final contre le dernier groupe djihadiste retranché dans l'usine.

Le chef du gouvernement algérien a affirmé que l'attaque islamiste, qui avait été préparée il y a deux mois au Mali, avait été coordonnée par un Canadien, identifié seulement sous le nom de "Chedad".

Deux islamistes découverts morts à l'intérieur du complexe étaient de nationalité canadienne, avait-on appris auparavant de source proche des services de sécurité algériens.

A Ottawa, le ministère des Affaires étrangères tente de recueillir des informations à ce sujet mais n'a évoqué l'implication possible que d'un seul ressortissant canadien dans l'attaque.

COMMANDO VENU DE LIBYE

Abdelmalek Sellal a précisé que les assaillants venus de la Libye voisine avaient d'abord tenté mercredi de prendre le contrôle d'un car transportant des travailleurs étrangers vers l'aéroport d'In Amenas. "Ils ont ouvert le feu sur le car mais ont déclenché une sévère riposte des soldats de l'escorte", a-t-il dit. "Ils voulaient prendre les passagers étrangers du car en otages mais ont dû y renoncer."

Au cours des combats pour reprendre le contrôle du site gazier, l'armée algérienne a intercepté des djihadistes qui tentaient de prendre la fuite à bord de plusieurs véhicules, emportant chacun trois ou quatre otages étrangers, certains avec des explosifs attachés autour du corps, a également rapporté le Premier ministre algérien.

Sous les tirs des soldats algériens, ces véhicules ont été détruits et l'un des chefs du commando a été tué, a-t-il précisé.

Selon un journal algérien, les islamistes sont arrivés à Tiguentourine à bord de véhicules peints aux couleurs de la compagnie énergétique nationale algérienne Sonatrach mais immatriculés en Libye.

Neuf Japonais, trois Britanniques, un Américain, un Français, deux Roumains figurent parmi les otages tués. Des Norvégiens et quatre Britanniques sont portés manquants.

Le ministre algérien du Pétrole, Youcef Yousfi, s'est rendu sur place et a déclaré que l'usine pourrait être rouverte dans deux jours, rapporte l'agence de presse APS.

La brigade des Moulathamine ("Ceux qui signent avec leur sang") du chef islamiste algérien Mokhtar Belmokhtar, dit "Le Borgne", a affirmé avoir mené cette prise d'otages en représailles aux raids aériens français contre les rebelles dans le nord du Mali, a rapporté l'Agence Nouakchott d'Information (Ani).

"CEUX QUI SIGNENT AVEC LEUR SANG"

La Brigade des Moulathamine a menacé de mener d'autres attaques si l'intervention de la France, appuyée par ses alliés occidentaux, se poursuit au Mali, rapporte le site d'observation SITE, qui relaie le communiqué des Moulathamine publié par l'agence de presse Ani.

Selon la Brigade des Moulathamine, les preneurs d'otages de Tiguentourine avaient proposé d'ouvrir des négociations pour libérer leurs prisonniers mais les autorités algériennes ont décidé d'utiliser la force.

"Nous avons tendu la main pour négocier avec les Occidentaux et les Algériens tout en leur donnant notre parole depuis le début de l'opération. Mais un responsable des renseignements (algériens) nous a affirmé qu'ils procéderaient à la destruction de tout le complexe", lit-on dans la version française du communiqué qui figure sur le site d'Ani.

A Londres, le Premier ministre David Cameron a déclaré lundi au Parlement que son pays allait participer aux efforts internationaux, notamment au niveau du renseignement, pour démanteler le groupe islamiste à l'origine de l'attaque d'In Amenas.

L'Afrique du Nord, a-t-il ajouté, est en train de devenir "un aimant pour les djihadistes" et la communauté internationale doit avoir conscience de cette menace. Il a aussi précisé que Londres envisageait de fournir un appui logistique accru aux soldats francais engagés au Mali mais ne s'engagerait pas dans des opérations de combat. (Guy Kerivel, Julien Dury et Danielle Rouquié pour le service français, édité par Pascal Liétout)

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