Montréal (awp/afp) - Bombardier a lancé mardi la dernière étape de sa réorganisation, lancée en 2015 en pleine crise, en vendant son programme d'avions régionaux CRJ au japonais Mitsubishi Heavy Industries (MHI): le groupe canadien se concentre désormais sur les jets d'affaires et le transport ferroviaire.

Après avoir cédé à Airbus, en 2018, son programme de moyen-courriers CSeries - rebaptisé A220 - et si cette transaction avec MHI est finalisée comme prévu au cours du second semestre 2020, la branche aérienne de Bombardier ne produira plus bientôt que des jets d'affaires, son coeur de métier qui a fait son succès.

Cette acquisition reflète l'appétit du japonais pour le marché des appareils régionaux.

Le groupe diversifié a conclu avec le constructeur aéronautique canadien "une entente définitive" concernant la vente du programme d'avions régionaux CRJ, des appareils de 75 à 100 places, contre 550 millions de dollars américains en liquidités.

Outre cette somme, le groupe de Tokyo versera à Bombardier 200 millions de dollars pour couvrir "des passifs" liés au programme CRJ, selon des communiqués des deux groupes. "La participation au résultat net de Bombardier dans le programme de titrisation d'avions régionaux (RASPRO, évaluée à environ 180 millions de dollars) sera transférée à MHI", précisent-ils.

Bombardier, présent dans l'aéronautique et les matériels ferroviaires, traverse une mauvaise passe depuis plusieurs années, résultat d'une difficile diversification.

Le groupe établi à Montréal s'est donc engagé en 2015 dans une vaste restructuration sur cinq ans, qui a déjà entraîné la perte de plusieurs milliers d'emplois dans le monde, malgré des prêts et subventions massifs des autorités québécoises et canadiennes.

Le PDG de Bombardier, Alain Bellemare, avait cependant assuré en novembre 2018 "vouloir garder" cette gamme d'avions régionaux, le seul programme d'appareils de ligne restant après la vente du programme du turbopropulseur Q400 et la cession des moyen-courriers CSeries à Airbus.

"Il n'y a que deux joueurs dans l'industrie" dans ce créneau des avions régionaux, le brésilien "Embraer et nous", avait-il dit.

Du CRJ au SpaceJet

Or, le japonais MHI nourrit aussi des ambitions dans ce secteur.

Même si son programme d'avion régional MRJ, en cours de développement, affiche un retard de sept ans en raison de problèmes techniques et des coûts de développement bien plus élevés que prévu, le groupe nippon a reçu quelque 400 commandes.

Selon le quotidien économique Nikkei, MHI prépare désormais une version plus petite de 70 places qui serait destinée au marché américain, sous un autre nom, le SpaceJet.

En mettant la main sur le programme CRJ, le Japonais hérite ainsi du savoir-faire du Québécois sur ce segment. En particulier, il met la main sur les activités de maintenance, de marketing et de vente du programme CRJ, dispersées entre le Canada (Montréal, Québec, Toronto) et les Etats-Unis (Bridgeport en Virginie-Occidentale et Tucson en Arizona).

"Cette transaction constitue l'une des étapes les plus importantes de notre direction stratégique visant à bâtir de solides capacités mondiales" et permet à MHI de se renforcer avec des services aéronautiques "comprenant la maintenance, la réparation et la révision, l'ingénierie et le soutien à la clientèle", s'est félicité Seiji Izumisawa, PDG de Mitsubishi Heavy Industries Ltd.

"Les activités acquises sont complémentaires des activités existantes de MHI liées aux avions commerciaux et tout particulièrement au développement, à la production, aux ventes et au soutien des avions commerciaux de la gamme Mitsubishi SpaceJet", a souligné le groupe canadien.

Pour le PDG de Bombardier Alain Bellemare, cette vente marque "la transformation de notre secteur aéronautique".

"L'avenir" du géant canadien de la mobilité, a-t-il ajouté, repose désormais "sur deux piliers de croissance solides: Bombardier Transport, regroupant nos activités de transport sur rail (...), et Bombardier Aviation, regroupant nos activités d'avions d'affaires".

Les marchés financiers saluaient cette annonce: le titre de Bombardier gagnait 2,51%, à 2,24 dollars canadiens, à la Bourse de Toronto vers 14H30 GMT.

afp/rp