Paris (awp/afp) - Après une pause pendant les Fêtes, Veolia a relancé son offensive sur Suez et adressé jeudi le détail de son projet d'offre, estimant avoir franchi ainsi une nouvelle étape dans le rapprochement "inéluctable" des deux rivaux.

Cette proposition formelle transmise au conseil d'administration "décrit l'ensemble des éléments du projet industriel, du projet social et des conditions financières que Veolia proposera lors du dépôt effectif de l'offre", indique Veolia dans un communiqué.

Jeudi soir, le conseil d'administration de Suez a accusé réception du courrier dans un communiqué et "examinera le document reçu".

"L'intérêt du projet pour les actionnaires et les autres parties prenantes, les salariés et les clients doit s'apprécier au regard des projets alternatifs présentant un potentiel de création de valeur significatif", souligne-t-il.

L'annonce de Veolia relance un feuilleton entamé fin août et qui a vu les directions des deux géants français de l'eau et des déchets s'affronter publiquement pendant plusieurs mois, en pleine crise sanitaire et économique.

Veolia a finalement acquis début octobre 29,9% de Suez auprès du groupe Engie et entend lancer une OPA sur les 70,1% du capital qui ne sont pas en sa possession après avoir obtenu le feu vert des actionnaires de sa cible lors d'une assemblée générale.

Mais ce projet est jugé hostile par Suez et le dossier s'est largement déplacé sur le terrain judiciaire ces derniers mois avec de multiples procédures en cours.

Le PDG de Veolia Antoine Frérot a cependant jugé lors d'une conférence de presse que le rapprochement était "inéluctable" et deviendrait "irréversible" après l'approbation des actionnaires. Il espère le boucler d'ici 9 à 15 mois.

"Nous franchissons aujourd'hui une nouvelle étape, qui nous rapproche encore de la réalisation de notre projet", a indiqué M. Frérot.

Face à l'hostilité de la direction de Suez, il entend séduire directement les actionnaires de l'entreprise qui pourraient être alléchés par son projet d'offre à 18 euros par action.

"L'unique obstacle à la réalisation de l'offre de Veolia, c'est l'attitude de ce conseil d'administration de Suez, qui joue contre les intérêts de ses propres actionnaires", a affirmé M. Frérot.

cartes sur table

Son groupe dit souhaiter "que cette nouvelle démarche permette à l'ensemble des actionnaires de Suez de prendre connaissance des modalités de la proposition d'offre de Veolia, sur laquelle ils auront à se prononcer".

La lettre de six pages adressée à Suez jeudi, publiée par Veolia, reprend les promesses du groupe sur les plans industriel et social. Elle défend également un prix "extrêmement attractif".

Elle est accompagnée d'un prospectus détaillant l'offre envisagée, mais pas déposée à ce stade auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Antoine Frérot cite aussi des "points ouverts pour une discussion", sur plusieurs sujets, dont la question épineuse du devenir de l'activité Suez Eau France, que Veolia entend céder au fonds Meridiam.

Le dirigeant imagine que cet ensemble pourrait avoir une "composante internationale" avec par exemple une présence dans "deux ou trois pays".

Suez a placé son activité Eau France dans une fondation de droit néerlandais pour en gêner la cession, une manoeuvre qui constitue l'un des contentieux juridiques en cours.

Alors que la direction Suez travaille aussi à un autre projet pour échapper à son concurrent, Antoine Frérot a demandé que cette éventuelle offre alternative soit "ou détaillée ou infirmée".

Le fonds Ardian s'était notamment dit prêt l'an dernier à jouer les chevaliers blancs aux côtés de Suez.

"Il est temps que les masques tombent et que les intentions se dévoilent. Nos cartes sont sur la table, qu'il en soit désormais de même pour tous", s'est agacé M. Frérot.

De son côté, l'intersyndicale de Suez s'est de nouveau opposée jeudi au projet de Veolia de créer un "champion mondial".

"C'est seulement un slogan creux, démagogique (...) qui n'a qu'un objectif: masquer la destruction de son principal concurrent au prix d'une casse sociale inévitable", estiment les syndicats dans un communiqué.

afp/rp