Paris (awp/afp) - Le "calme entre deux tempêtes": les marchés des matières premières, et notamment des métaux rares essentiels dans la transition énergétique, devraient connaître en 2023 une accalmie avant de repartir à la hausse avec la demande mondiale, selon le guide des matières premières CyclOpe.

Philippe Chalmin, principal coordinateur du guide rappelle que 2022 a été le théâtre de plusieurs crises : une crise énergétique, résultat de la reprise économique puis de la guerre en Ukraine et "qui semble presque se normaliser tout en maintenant quand même de fortes tensions" ; une crise agricole qui est "un petit peu aussi derrière nous".

"Paradoxalement, l'année a été relativement calme sur les marchés des métaux, même si c'est là que nous ressentons aujourd'hui les tensions potentielles à venir les plus grandes", ajoute M. Chalmin, fondateur de la société d'études CyclOpe, dont le 37e rapport annuel est paru mardi (éditions Economica).

Si 2022 et la guerre en Ukraine ont mis le gaz et le blé sous le feu des projecteurs, les années à venir pourraient selon lui faire du cuivre la vedette des marchés.

Dans l'immédiat, le LME Index, un indice qui intègre les prix de l'aluminium, du cuivre, du plomb, du nickel, de l'étain et du zinc échangés sur la Bourse des métaux de Londres (LME), est à son plus bas niveau depuis plus de six mois (3.669,70 points la semaine dernière) et il a baissé de près de 8% depuis le début de l'année.

Certains de ces métaux très demandés sont utilisés dans les batteries de véhicules électriques.

Le prix du carbonate de lithium, notamment, a été "divisé par trois sur le marché chinois", indique Yves Jégourel, co-directeur du rapport. Il avait culminé à près de 600.000 yuans (environ 78.950 euros) la tonne en novembre 2022, avant de chuter de 70% pendant cinq mois consécutifs.

"Deux explications à cela", selon Gaétan Lefebvre, du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Il cite d'une part la baisse des subventions chinoises sur les véhicules électriques dont le pays est le premier producteur au monde et donc un des principaux consommateurs de batteries, et d'autre part, les "bons niveaux de production des mines australiennes".

Véhicules gourmands en cuivre

"Mais sur le moyen terme, les prix vont se restabiliser à la hausse", prévient-il, évoquant les nombreux projets de giga-factories de batteries annoncés ces dernières semaines en Europe, ainsi qu'un "déficit d'investissement" au niveau du raffinage du lithium, ce qui "va provoquer très fortement des hausses de prix".

Depuis fin avril, le lithium "semble avoir retrouvé le chemin de la hausse", notent les analystes de Morgan Stanley.

"Les ventes de véhicules électriques et la production de batteries en Chine (ont) repris le chemin de la croissance après un début d'année en demi-teinte", soulignent-ils, notant une amélioration du sentiment sur le marché et une diminution des stocks.

Le cuivre est également tombé mardi à un prix plus vu depuis fin novembre 2022 sur le London Metal Exchange, à 8.022 dollars la tonne, un peu plus d'un an après avoir atteint son record historique en mars 2022, dans la foulée de l'invasion russe de l'Ukraine. Il a depuis dévissé de plus de 25%.

Fortement utilisé dans l'industrie, notamment pour la confection de circuits électriques, le cuivre est connu pour refléter l'état de santé de l'économie mondiale, d'où son surnom de Docteur Cuivre (Dr Copper). Les préoccupations liées aux risques de récession mondiale pèsent donc directement sur le métal rouge.

Néanmoins, pour les années à venir, M. Jégourel pointe "un abaissement structurel des teneurs" des gisements existants ce qui va immanquablement soutenir les cours et nécessiter de la "sobriété matière".

Il rappelle ainsi que le cuivre, en moyenne, dans un véhicule à moteur thermique, c'est 23 kilogrammes, dans un véhicule hybride c'est 60 kg, dans un véhicule électrique c'est 80 kg, en moyenne: "plus vous avez des SUV d'une taille importante, plus la quantité de cuivre va augmenter".

Le guide CyclOpe anticipe une petite remontée des cours du cuivre de 2% entre 2022 et 2023, mais la hausse serait nettement plus substantielle selon d'autres analystes, jusqu'à 12.000 dollars la tonne en moyenne en 2024 pour Goldman Sachs, voire dès le deuxième trimestre 2023 selon Bank of America.

afp/rp