SAO PAULO, 3 juillet (Reuters) - La banque BNDES ne mobilisera pas les 2,4 milliards de dollars qu'elle avait promis pour la fusion entre les deux premiers distributeurs brésiliens, Grupo Pao de Açucar et Carrefour (>> CARREFOUR), à moins que Casino  (>> CASINO GUICHARD) ne donne son feu vert, a déclaré le président de la banque Luciano Coutinho.

Dans un entretien publié samedi par l'hebdomadaire brésilien Veja, Coutinho dit que "sans accord, l'affaire est à l'eau". "Sans accord entre Pao de Açucar et Casino, la BNDES ne participera pas à la transaction", ajoute-t-il.

Cette déclaration souligne à quel point la banque et le gouvernement brésilien sont de plus en plus regardants vis-à-vis d'une opération qui aboutirait à créer un géant au chiffre d'affaires annuel de 65 milliards de réals (42 milliards de dollars, 29 milliards d'euros).

Casino est actionnaire de Pao de Açucar (>> Cia Brasil. de Distrib. Pao de Acucar), avec une participation qui atteint à présent 43,1% du capital. Il en exerce le contrôle opérationnel à parité avec le milliardaire Abilio Diniz - président du conseil d'administration du distributeur brésilien - au sein de la holding Wilkes.

Ce contrôle est le fruit d'un accord signé voici 10 ans entre Casino et Diniz, qui donne par ailleurs au distributeur français la possibilité d'être seul maître à bord à compter de juin 2012 grâce à l'exercice d'une option d'achat.

Casino voit d'un mauvais oeil une transaction au terme de laquelle il serait minoritaire dans une entité contrôlée par son concurrent Carrefour. Il a ouvert une procédure d'arbitrage contre Diniz pour avoir, affirme-t-il, négocié l'affaire sans lui en faire part.

28 HEURES ENVIRON

Diniz s'en défend, dans un entretien donné également au magazine Veja et publié samedi. "Le fait est que j'ai vu l'opportunité d'acheter une partie des opérations (de Carrefour). J'ai présenté cette idée à mon associé, Jean-Charles Naouri (PDG) de Casino", explique Diniz. "J'en ai parlé avec lui en décembre lors d'un déjeuner au George V à Paris mais il n'était pas intéressé".

Diniz ajoute qu'il n'a plus rencontré Naouri par la suite et s'est dit surpris qu'il y ait eu des fuites plusieurs mois après sur ses négociations avec Carrefour.

"Je me suis rendu à Paris la sermaine dernière pour tenter de la rencontrer et lui présenter les termes de la proposition. J'ai attendu 28 heures environ, de dimanche soir à mardi matin, mais il ne voulait pas me rencontrer".

Le président de la BNDES (Banque nationale brésilienne de développement) convient qu'une fusion entre Pao de Açucar et Carrefour aurait des avantages mais ses propos montrent que le gouvernement est devenu plus circonspect qu'en début de semaine, lorsqu'un tel rapprochement était vanté comme pouvant potentiellement développer les ventes à l'exportation de biens brésiliens.

La transaction s'inscrirait bien dans l'objectif de la BNDES de créer des champions nationaux d'envergure internationale. La banque a ainsi aidé JBS (>> JBS SA) à devenir le numéro un mondial du conditionnement de la viande en un peu moins de cinq ans.

Mais des médias locaux, des parlementaires d'opposition et des analystes sont tombés à bras raccourcis sur le projet, remettant en cause pratiquement chaque argument avancé par le gouvernement et Diniz pour défendre la fusion.

"Notre but est de financer des leaders nationaux parmi les sociétés brésiliennes", explique Coutinho. "C'est pour nous une condition fondamentale pour participer au projet. Mais il est prématuré de parler des modalités du contrat; nous en sommes aux étapes préliminaires".

LE POINT sur le dossier Carrefour

(Reese Ewing et Guillermo Para-Bernal, Wilfrid Exbrayat pour le service français)