Paris (awp/afp) - Les prix du blé et du maïs sont remontés ces derniers jours sur le marché européen, un rebond essentiellement lié à la baisse de l'euro face au dollar, dans un contexte de forte compétitivité du blé russe.

Mercredi après-midi, la tonne de blé meunier s'échangeait à 293 euros sur Euronext et celle de maïs à 287 euros, en hausse de plus de 3% sur une semaine.

A la Bourse de Chicago, les cours grimpaient après la parution du rapport mensuel Wasde du ministère de l'Agriculture (USDA) sur les prévisions mondiales de productions, de stocks et d'exportations.

Le ministère américain a de nouveau revu à la baisse ses prévisions de production mondiale de maïs et de soja pour la campagne en cours, notamment à cause du temps sec en Argentine, tandis que celle de blé a été augmentée.

Repli de l'euro

Le rebond européen "est essentiellement dû au repli de l'euro face au dollar, ce qui permet au prix du blé de progresser en euros, avec des cours en clôture mardi au plus haut depuis le 10 janvier", a expliqué Sébastien Poncelet, analyste au cabinet Agritel.

Plusieurs autres éléments expliquent selon lui cette remontée: "le faible écart de prix entre blé et maïs, qui redonne de l'intérêt au blé comme fourrage", la prise en compte de "risques climatiques, avec des météos sèches sur les blés américains et russes" et enfin de "risques géopolitiques".

Les marchés sont en effet attentifs à la marche des exportations maritimes ukrainiennes, alors que l'accord passé en juillet dernier sous l'égide de l'ONU et de la Turquie pour sortir des produits agricoles d'Ukraine arrive à échéance le 19 mars. "Il y a toujours des inquiétudes sur son renouvellement".

A Chicago, le cours du blé a été soutenu par des achats à la suite des annonces de livraisons à l'Ukraine de véhicules blindés par les États-Unis et l'Allemagne, permettant potentiellement une intensification du conflit "pendant la période où le blé pousse" et alors qu'approche le temps des semis de maïs, selon Jack Scoville, analyste à Price Futures Group.

La demande de blé américain, "décevante toute l'année", a "été entravée par les prix bas et les offres agressives de la Russie" qui "a une production importante et sous-cote la plupart des prix mondiaux", explique-t-il.

Illustration de cette pression, ressentie sur tous les marchés: la Russie vient de remporter intégralement un appel d'offre de l'Égypte pour 535.000 tonnes de blé, "avec des prix au plus bas depuis 2021", selon Sébastien Poncelet.

Mercredi, le cours de la céréale grimpait aussi (+1,30% à la bourse de Chicago à 19H00 GMT) porté par les craintes des conséquences des tremblements de terre en Turquie et en Syrie, sur la fourniture de farine dans cette importante région de meunerie.

Ballon chinois

Si les jeux sont faits dans les champs pour la céréale du pain, il reste des incertitudes pour le maïs, qui voit ses prix consolidés par les risques climatiques.

Aux États-Unis, la tendance est "haussière" pour les prix depuis début décembre: "la demande d'exportation a été solide la semaine dernière même si elle reste bien en deçà du rythme nécessaire pour atteindre les objectifs de l'USDA", selon Jack Scoville.

En Amérique latine, c'est la situation au Brésil qui inquiète: "la récolte de soja prend du retard à cause des pluies, ce qui retarde les semis de maïs, qui sont effectués dans la foulée", selon l'analyste d'Agritel. Avec un risque, notamment dans le Mato Grosso (centre), celui d'"être exposé à la sécheresse" dès la fin avril.

Le cours du soja, quant à lui, a baissé lundi après que les États-Unis ont abattu un ballon chinois considéré par le Pentagone comme un dispositif espion.

La Chine, qui a affirmé qu'il s'agissait d'un aéronef civil, a protesté. Et "le marché craint une escalade des tensions avec le grand acheteur mondial de produits agricoles", selon Jack Scoville.

Le niveau des importations de la Chine sera une des clés du marché au printemps 2023. D'ici là, les opérateurs sont curieux de voir les ajustements opérés par l'USDA dans son dernier rapport, notamment sur deux points: le niveau de la récolte russe, jusqu'ici estimée à 91 millions de tonnes contre 104 millions pour les services statistiques russes, et celui de la production de blé argentine, qui devrait être revue à la baisse.

afp/rp