Le management prétend que sa plate-forme Falcon l'emporte huit fois sur dix lorsque mise en compétition contre l'alternative proposée par Microsoft. Le taux de croissance de Crowdstrike ne contredit pas cette affirmation téméraire, puisque le nombre de clients institutionnels a décuplé sur les cinq dernières années.

L'attrait du modèle d'affaires de l'entreprise réside bien sûr dans la récurrence des revenus, assurée par les abonnements souscrits à sa plate-forme — évolutive et sans cesse enrichie de nouveaux modules. Ce chiffre d'affaires récurrent est lui multiplié par quinze en cinq ans, tandis que la rétention des utilisateurs reste solidement ancrée aux alentours de 98%.

La marge brute est impressionnante — supérieure à Microsoft — mais l'exploitation n'est passée dans le vert qu'il y a quelques trimestres seulement. Le problème de Crowdstrike, à l'instar des autres acteurs émergents de la technologie, réside on le sait dans le coût prohibitif du personnel, et les lourdes rémunérations en stock-options qui vont avec.

Certains investisseurs s'en accommoderont, quand d'autres reculeront en observant par exemple que les trois principaux dirigeants de l'entreprise ont reçu en 2022 une rémunération totale de $185 millions, dont $146 millions en stock-options pour le seul CEO George Kurtz. 

Ceci représente pour l'anecdote exactement 10% du chiffre d'affaires — du chiffre d'affaires, pas du profit ! — réalisé sur l'année, et directement tombé dans la poche du CEO.

Comme de coutume, on observe aussi à ce niveau une pénible divergence entre le profit cash communiqué par le management et le profit cash retraité du coût des stock-options. Ce trimestre, Crowdstrike revendique un free cash-flow de $227 millions, tandis que les stock-options s'élèvent à $130 millions. 

Dans ces conditions, et nonobstant son remarquable succès commercial, il est toujours difficile de justifier une valorisation de x12 le chiffre d'affaires. On note au passage que cette dernière s'est très dramatiquement dégonflée depuis les aberrations de la pandémie, lorsqu'elle frisait avec un multiple de x40 le chiffre d'affaires. 

Crowdstrike et Palo Alto restent alignés sur des modèles de développement comparables, qui font davantage la part belle aux acquisitions que le modèle privilégié par leur concurrent Fortinet — un familier des sélections quantitatives de Zonebourse. 

L'entreprise conserve un bilan exceptionnel, avec $3 milliards de cash en excès qu'elle utilisera sans doute à des fins de consolidation supplémentaire.