SAINT-GOBAIN - Saint-Gobain veut racheter 16,1% du capital et 52,4% des droits de vote de Sika
- Le montant de l'opération s'élève à 2,3 milliards d'euros
- Le conseil et les dirigeants de Sika se disent hostiles à l'opération
- Saint-Gobain attend des synergies de 100 millions d'euros dès 2017
- Le groupe veut par ailleurs céder sa filiale Verallia
- Des fonds d'investissement et des groupes industriels sont intéressés pour racheter Verallia
- Le titre Saint-Gobain chute de 5,9%
(Actualisation: déclarations du PDG, communiqué de Sika et cours de Bourse)
Le groupe de matériaux de construction Saint-Gobain (>> SAINT GOBAIN) veut prendre le contrôle du spécialiste de la chimie de construction Sika (SIKN.EB) pour 2,75 milliards de francs suisses, soit environ 2,3 milliards d'euros, malgré l'hostilité de la direction et du conseil d'administration du groupe suisse.
Saint-Gobain a annoncé lundi qu'il prévoyait de racheter la holding Schenker Winkler Holding, qui détient 16,1% du capital et 52,4% des droits de vote de Sika. "Saint-Gobain n'a pas l'intention de procéder à une offre sur la totalité du capital de Sika et fait pleinement confiance à la société pour poursuivre son développement", a-t-il indiqué dans un communiqué.
Mais le groupe se heurte à l'hostilité de la direction et du conseil d'administration de Sika, qui refusent ce changement de contrôle. Les administrateurs et dirigeants affirment ne pas percevoir de "logique industrielle" dans cette opération, ni de "synergies importantes".
"De plus, le conseil et la direction du groupe pensent que la valeur pour les actionnaires serait réduite alors que Sika ne serait pas capable de poursuivre sa stratégie de croissance dans le cadre du projet de contrôle prévu", ont-ils indiqué. Les membres du conseil et les dirigeants ont prévenu qu'ils comptaient démissionner à l'issue de l'opération.
Sika redoute de possibles conflits d'intérêts
Sika, qui a été averti vendredi soir de la transaction, avait tenu une semaine plus tôt une réunion investisseurs avec la famille Burkard, propriétaire de la holding Schenker Winkler.
Il n'y a eu aucune indication selon laquelle la famille n'était pas satisfaite des performances du groupe lors de cette réunion. "La famille a réalisé la vente de sa propre initiative", a déclaré le président du conseil, Paul Hälg, lors d'une conférence de presse. Personne n'était joignable auprès de la holding Schenker Winkler pour apporter un commentaire.
Le président du conseil et le directeur général, Jen Jenisch, ont estimé que la prise de contrôle de Saint-Gobain créait un possible conflit d'intérêts alors que Saint-Gobain et Sika sont concurrents sur certains secteurs. L'opération pourrait aussi limiter la capacité de Sika à se développer dans des zones géographiques où Saint-Gobain est déjà présent.
Saint-Gobain a offert une prime de 80% par rapport au cours de clôture de Sika vendredi soir, à 3.886 francs suisses, pour reprendre la participation de la famille Burkard. Lundi, le titre du groupe suisse chutait néanmoins de 18,4% à la Bourse de Zurich, alors que Saint-Gobain a affirmé son intention de ne pas racheter la totalité du capital.
Des synergies de 100 millions d'euros attendues dès 2017
A la Bourse de Paris, l'action Saint-Gobain reculait pour sa part de 5,9% à 35,04 euros, accusant le plus fort repli du CAC 40 et du SBF 120. "Nous avons du mal à comprendre le prix payé pour prendre seulement 16% du capital", relève Kepler Cheuvreux, qui estime que l'opération crée en outre des incertitudes.
L'offre de Saint-Gobain pour Sika est inattendue, estiment de leur côté les analystes de la banque privée J. Safra Sarasin. "Cette transaction est logique à long terme mais à court terme, nous ne voyons aucun catalyseur pour une surperformance de l'action Saint-Gobain", ont-ils indiqué.
De son côté, Saint-Gobain assure que la prise de contrôle de Sika, qui a réalisé en 2013 un chiffre d'affaires d'environ 4,3 milliards d'euros, devrait avoir un impact positif sur son résultat net dès la première année. Avec cette opération, le groupe vise des synergies de 100 millions d'euros dès 2017 et de 180 millions d'euros par an à compter de 2019, grâce à la proximité des activités de Sika avec les métiers de Saint-Gobain dans les produits pour la construction et les matériaux innovants.
"Cette opération sera créatrice de valeur à partir de la quatrième année", a affirmé Saint-Gobain. La prise de contrôle de Sika, qui est soumise à l'autorisation des autorités de la concurrence compétentes, devrait être finalisée au plus tard au second semestre 2015.
Malgré les commentaires de la direction de Sika, le PDG de Saint-Gobain, Pierre-André de Chalendar, a réaffirmé que le groupe souhaitait le maintien des dirigeants à la tête du groupe suisse après la transaction.
Des fonds d'investissement et de groupes industriels intéressés par Verallia
Par ailleurs, Saint-Gobain a fait savoir qu'il allait lancer le processus de vente de sa filiale d'emballages en verre, Verallia, qu'il avait auparavant cherché à introduire en Bourse. Le groupe compte lancer "un processus formel et concurrentiel" sur la base des résultats du deuxième semestre de sa filiale. L'objectif est de trouver un accord avec un acheteur avant l'été 2015.
"Nous avons reçu toute une série de marques d'intérêt" de la part de fonds d'investissement et de groupes industriels, a indiqué Pierre-André de Chalendar, lors d'une conférence téléphonique. "Nous avons un large choix", a-t-il ajouté, précisant vouloir céder sa filiale en un bloc.
Verallia emploie environ 10.000 personnes et a réalisé en 2013 un chiffre d'affaires de 2,4 milliards d'euros. L'annonce de la cession de la société d'emballages en verre intervient après la vente, au printemps, des activités nord-américaines de la filiale.
En 2011, Saint-Gobain avait tenté d'introduire Verallia en Bourse, sans succès. A l'époque, l'IPO, portant sur 40% du capital de l'entreprise, valorisait Verallia entre 2 milliards et 2,4 milliards d'euros.
"Les deux opérations dont nous annonçons le projet vont accélérer le recentrage stratégique du groupe Saint-Gobain sur la conception, la production et la distribution de solutions innovantes et de haute performance pour l'habitat et l'industrie", a indiqué Pierre-André de Chalendar.
-Blandine Hénault, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 53; blandine.henault@wsj.com
(Andrew Morse a contribué à cet article)
