Paris (awp/afp) - Après une année frustrante et chaotique, la Bourse de Paris se prépare en 2019 à un scénario "compliqué" et "très volatil", avec de nombreux développements politiques difficiles à anticiper et incitant à la prudence.

Pour l'indice vedette CAC 40, "en début d'année, nous nous attendions à des performances de l'ordre de 8% à 10%" grâce à de bonnes bases de croissance européenne et une orientation positive du côté des sociétés, rappelle Laurent Denize, co-directeur des investissements chez Oddo BHF AM.

Les tensions commerciales, avec dès mars les premières menaces des Etats-Unis, "ont porté un coup à la confiance", moteur du marché, souligne Mme Jeanne Asseraf-Bitton, responsable de la recherche chez Lyxor.

Et d'autres risques bien identifiés se sont accumulés: un Brexit à l'épilogue encore hypothétique, une dette italienne sous pression et des signes de ralentissement de la croissance. Autant d'éléments qui ont fait de 2018 "l'année du retour à l'incertitude", résume Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement chez Carmignac.

Résultat: le CAC 40 affiche une perte de 10,95% pour 2018, soit sa pire année depuis 2016 (-16,95%), alors qu'il avait progressé de 9% l'année précédente.

L'année a toutefois été difficile pour toutes les places européennes, voire même pire pour le Dax qui a perdu 18,3%. La Bourse de Londres a pour sa part reculé de 12,48%.

Dans un contexte d'aversion au risque, que certains jugent "exagéré", la cote parisienne a connu des mouvements de ventes parfois sévères, comme en février sur fond de hausse des taux américains, ainsi qu'en octobre après une révision à la baisse des perspectives de croissance dans les grandes régions du monde, conjuguée aux feuilletons du budget italien et du Brexit.

Rien n'a pu étouffer ces craintes. Ni la bonne tenue des résultats d'entreprises ni des fondamentaux économiques plutôt robustes n'ont été récompensés en Bourse, soulignent les acteurs du marché.

2018 constitue "une interruption mais pas un krach, ni une cassure forte de marché", nuance Vincent Mortier, directeur adjoint de la gestion chez Amundi.

La volatilité va perdurer

Compte tenu de nombreux points d'interrogation, "tout peut évoluer dans un sens comme dans l'autre" en 2019, reconnaît M. Denize. "Mais il faudra un peu de temps avant que la confiance ne revienne."

"Le marché va rester compliqué", car "l'incertitude sur la politique économique et le commerce mondial pèsent sur l'investissement", assure Jeanne Asseraf-Bitton, responsable de la recherche chez Lyxor. "Tout dépendra aussi de ce que deviendront les négociations entre la Chine et les Etats-Unis mais aussi le Brexit."

La plupart des experts estiment que la forte volatilité, qui s'est installée, va perdurer en 2019. "Au moins au premier semestre", précise M. Mortier, le temps d'"y voir plus clair".

Car normalement d'ici-là, les investisseurs sauront si la confrontation commerciale dégénère, ils connaîtront le nom du prochain gouverneur de la Banque centrale européenne (BCE), l'issue des élections européennes de mai et le modus operandi choisi par Bruxelles et Rome sur la dette italienne.

Du côté des banques centrales, les dernières réunions de la BCE et de la Fed ont apporté quelques clarifications : la première a acté la fin de son vaste programme de soutien à l'économie et la seconde a choisi de résister à la pression du président américain en relevant une nouvelle fois ses taux d'intérêts. Cette décision n'a pas été du goût des marchés boursiers et la baisse généralisée qui en a découlé a éteint les derniers espoirs d'un véritable rebond de fin d'année.

Jusqu'à l'été, les investisseurs devront cependant avoir "le coeur bien accroché" devant "des mouvements de hausse et de baisse encore plus marqués et violents" que cette année, prédit M. Mortier.

"Un des risques principaux pour les marchés actions (...) est que la confirmation du ralentissement économique ait un effet sur les résultats d'entreprises ", souligne Didier Saint-Georges.

Les perspectives économiques mondiales se sont dégradées, avec un ralentissement de la croissance prévu en 2019, aux Etats-Unis, en Chine et en zone euro.

Et les conséquences financières du mouvement des "gilets" jaunes" pourraient "perturber le CAC l'an prochain", selon M. Denize. La Banque de France a déjà révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour l'économie française, à 1,5% pour 2018 et 2019.

afp/rp