PARIS (awp/afp) - Enlisés dans les tranchées d'une guerre commerciale sino-américaine à l'issue toujours incertaine, les marchés européens aborderont juin d'autant plus lestés par ce dossier que les attentes autour de la réunion de la BCE sont limitées.

"La semaine ne s'annonce pas calme", avec ce conflit qui continuera à occuper le devant de la scène dans les prochains jours, anticipe auprès de l'AFP Vincent Juvyns, un stratégiste de JPMorgan AM.

"Elle pourrait en outre commencer difficilement" avec les chiffres d'activité manufacturière (PMI) en Chine au mois de mai publiés dimanche qui, "sans être dramatiques devraient être marqués par un infléchissement", complète-t-il.

"Le risque que l'accord ne se négocie pas avant l'été, va conduire à des positions plus attentistes et la semaine prochaine le marché risque d'être encore un peu indécis dans cet environnement politique toujours délicat", estime également Xavier Denis, responsable de la recherche multi-actifs chez Lyxor.

C'est dans cet environnement instable, que la réunion de la BCE se tiendra jeudi, avec une conférence de presse délocalisée à Vilnius, en Lituanie.

La banque centrale annoncera probablement le maintien des taux à leur plus bas niveau jusqu'à au moins la mi-2020 ainsi que les modalités de la troisième vague de prêts géants bon marché (TLTRO) aux banques, selon Andrew Kenningham, chef économiste chez Capital Economics.

Les conditions de ces nouveaux prêts "seront sans doute moins généreuses que les précédentes", juge pour sa part auprès de l'AFP Bronka Rzepkowski, responsable de la stratégie d'investissement multi-actifs du néerlandais NN IP.

"Cela peut potentiellement décevoir les marchés et entretenir un climat d'aversion au risque, à moins que le président de la BCE ne parvienne à rassurer parallèlement à ces annonces", selon elle.

Élections européennes bien perçues

A Londres, un autre rendez-vous prendra une place prépondérante, à savoir la visite de Donald Trump au Royaume-Uni de lundi à mercredi.

Le président américain pourrait notamment faire pression sur le Royaume-Uni pour que le pays imite les États-Unis en interdisant l'utilisation des produits de l'équipementier télécoms chinois Huawei, alors que Londres doit rendre sa décision en la matière début juin.

L'escalade des tensions commerciales a également été le sujet dominant sur les marchés européens cette semaine, avec un effet clairement négatif.

L'indice londonien a en particulier été pénalisé par son puissant secteur minier, très dépendant des risques pesant sur la croissance mondiale et alimentant le ralentissement économique en Chine, premier importateur au monde de métaux.

A Francfort, l'indice vedette s'est aussi éloigné de la barre des 12.000 points, pour retrouver son niveau de début avril tandis que le CAC est revenu pour sa part à son niveau de février.

Par contre, "les résultats des élections européennes ont été plutôt bien perçues par les marchés", a noté M. Denis.

"La poussée des verts et les gains considérables des partis considérés comme libéraux ont été considérés comme des éléments rassurants au niveau des équilibres politiques sur le continent", a-t-il ajouté.

Au final, d'après l'expert, les indices n'ont pas si mal résisté, aidés sans doute par "une saison des résultats qui s'est bien passée", notamment aux États-Unis et par le fait que les marchés "ne croient pas vraiment à une expansion de la guerre commerciale même si le risque a considérablement augmenté depuis un mois".

Mais, souligne M. Juvyns, si sur les indices européens les performances depuis le 1er janvier restent largement positives, "les marchés n'ont toutefois pas fait mentir l'adage" qui veut que les investisseurs choisissent ce mois pour vendre avant de lever le camp pour l'été ("sell in may and go away").

"Face à l'amoncellement des risques et des incertitudes, poursuit-il, les investisseurs en ont profité pour prendre des bénéfices en attendant de voir ce qui se passera sur le front commercial".

bur-abx/ref/bp