Muhammad Yunus, 71 ans, a été limogé le 2 mars de la Grameen Bank par la Banque centrale du Bangladesh. Cette dernière lui reproche d’avoir omis d’obtenir une autorisation en bonne et due forme au moment de sa reconduction en 1999 à la direction générale de l’établissement qu’il avait créé en 1983. La haute cour de justice a confirmé cette décision le 8 mars, estimant le licenciement légal, essentiellement parce que Yunus a plus de 60 ans et ne peut plus diriger un établissement bancaire.

Entérinant cette décision cette semaine, notre baron a indiqué qu’il quittait son poste de directeur général, un fauteuil qu’occupera désormais son adjoint, Nurjahan Begum. Son communiqué : « Je prends cette décision sans préjudice d’éventuelles questions légales [futures] et afin d’éviter toute gêne indue aux activités de la Grameen Bank. J’espère qu’elle va poursuivre ses activités, en maintenant son indépendance et son caractère ».

Selon ses partisans, le « banquier des pauvres » est victime de ses ambitions politiques. L’actuel Premier ministre, Sheikh Hasina, aurait de fait très peu goûté les flèches lancées par Yunus contre la classe dirigeante, supposée être seulement intéressée par « l’argent et le pouvoir ». En réponse, Hasina avait accusé Yunus de « sucer le sang des pauvres » et de manipulations financières pour ne pas payer d’impôts.

Plus sûrement, c’est l’influence considérable de la Grameen Bank, qui compte 8 millions de clients et emploie 24 000 personnes, qui est à l’origine des ennuis de Muhammad Yunus et de la jalousie du gouvernement. La banque des pauvres, détenue à 25% par les pouvoirs publics, a en outre des activités dans les panneaux solaires, la téléphonie mobile ou l’assurance-maladie.

« Dès que l’on brasse de l’argent, on crée des polémiques », admet Yunus. Pour le gouvernement, la Grameen Bank est un « énorme conglomérat » dont l’expansion est en « inadéquation avec les règles originelles » de la banque, d’où la nécessité de lui conférer « un nouveau cadre juridique ». Le départ de Yunus fait manifestement partie de ce nouveau cadre...