Je vais essayer ce matin de me dépêtrer d'un exercice que j'ai toujours du mal à maîtriser depuis vingt ans que je fais ce métier : écrire des choses constructives dans une période boursière compliquée, sans être trop grandiloquent ni donneur de leçon. En commençant par un peu d'histoire. Oh je ne vais pas remonter bien loin, juste au 22 novembre dernier. Ce jour-là, le Nasdaq 100 a touché un record à 16 764 points en séance. Depuis hier, il est 27% plus bas. C'est considérable comme baisse en six mois. Mais j'entends déjà Mamie Lucette me dire "tu m'ennuies à toujours parler du nassedaque, qu'est-ce que ça a à voir avec le caquequarante ?". Le CAC40 a perdu 17,6% sur ses plus hauts, qui datent du 5 janvier. C'est considérable comme baisse en quatre mois. Je parle souvent du Nasdaq parce qu'il cristallise l'appétit déraisonnable des investisseurs pour le risque et une certaine forme de panurgisme depuis 2008.

Un panurgisme qui a sans doute contribué à entretenir l'illusion d'une hausse sans fin des marchés. Ce qui est vrai d'ailleurs : les marchés sont structurellement haussiers. Par contre quand on accepte 12 années de hausses en 13 ans comme ce fut le cas sur le Nasdaq 100 entre 2008 et 2021 (2018 étant la seule exception, et encore sur une contraction de -0,12%), il faut aussi s'attendre à quelques retours de manivelle. Pour le CAC40, puisque Mamie Lucette me surveille, c'est un peu moins flamboyant mais c'est pas mal quand même : six hausses sur les sept dernières années, si l'on inclut les dividendes, et un indice qui a plus que doublé entre 2011 et 2021.

La réalité, c'est que la fuite en avant des marchés actions n'était plus tenable compte tenu des vents contraires actuels. Trop d'inflation, trop de tensions géopolitiques, trop de déséquilibres productifs, trop d'argent consacré à la spéculation et pas suffisamment ailleurs. J'arrête là pour ne pas aller sur des terrains trop glissants. Jusqu'à une date récente, n'importe qui pouvait s'en sortir même en faisant à peu près n'importe quoi. Je ne sais plus qui a dit que les performances passées augmentent plus la confiance que les compétences, mais c'est un peu l'idée. Maintenant que nous sommes dans le dur, il faut à nouveau marteler les bons vieux principes d'investissement : miser sur des entreprises de qualité, dont les fondamentaux sont adaptés aux conditions macroéconomiques actuelles, être diversifié, ajuster son niveau de risque, etc. etc. Regagner en humilité aussi, ça ne fait jamais de mal.

Il va continuer à y avoir de la volatilité dans les jours à venir, dans les deux sens d'ailleurs. Mamie Lucette vous recommande de vous méfier de l'annonce des chiffres de l'inflation aux Etats-Unis en avril, lesquels seront publiés mercredi. Ils ont un fort pouvoir d'influence sur le moral des troupes, parce qu'ils peuvent nourrir la boîte à fantasmes des investisseurs quant à la politique monétaire de la Fed. Mamie Lucette préférerait que je parle de la Banque de France, mais j'ai dû lui expliquer qu'elle ne s'occupait plus de çà.

L'ambiance du jour est un peu moins morose sur les marchés, avec des indicateurs avancés américains qui montrent des signes de rebond. Mais comme je ne suis pas un perdreau de l'année, je préfère vous dire que dans des tels contextes, les retournements sont fréquents et s'enclenchent sur des détails. D'ailleurs, l'indice de volatilité VIX est remonté au-dessus des 35 points, flirtant avec son pic de mars dernier. Cela signifie que le moindre haussement de sourcil de Jerome Powell, que Mamie Lucette trouve très beau, peut avoir des conséquences sur les indices.

Au niveau macroéconomique, la peur de l'inflation a été remplacée par la crainte de l'austérité monétaire, qui est en train de se transformer en appréhension d'une récession. Ce qui a fait lâcher hier l'amortisseur star de 2022, le secteur pétrolier, dont la chute est venue s'ajouter à celle du compartiment technologique. Les investisseurs américains sont allés se pelotonner sur la santé et la grosse valeur de bon père de famille, de PepsiCo à Kellogg en passant par Johnson & Johnson.

Les marchés d'Asie-Pacifique sont largement baissiers ce matin, à l'exception de Shanghai. Tokyo perd 0,6% tandis que Hong Kong chute de 2,2%. La Chine est toujours confrontée aux désordres de la politique zéro-covid, qui forcent par exemple Tesla à stopper la production de son usine de Shanghai, faute de pièces. Dans un tout autre registre, le contexte actuel n'empêche pas Philip Morris de négocier le rachat de son homologue suédois Swedish Match, qui pèse actuellement près de 11 Mds€. Enfin, on notera que le rendement de la dette américaine à 10 ans s'est un peu dégonflé à 3,03%, tandis que les actifs à risque souffrent toujours : le bitcoin a même fait une brève incursion sous les 30 000 USD l'unité dans la nuit. Le CAC40 gagnait 1,1% à 6151 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

L'indice ZEW permettra, à 10h00, de prendre le pouls des investisseurs allemands. Tout l'agenda "macro" ici.

L'euro remonte légèrement à 1,0574 USD. L'once d'or baisse à 1860 USD. Le pétrole cède du terrain lui aussi, avec un Brent de Mer du Nord à 103,55 USD le baril et un brut léger américain WTI à 101,33 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans recule un peu à 3,03%. Le bitcoin recule sous 30 743 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adocia : Kepler Cheuvreux reste à l'achat avec un objectif réduit de 19 à 12 EUR.
  • Airbus : Société Générale passe de conserver à acheter en visant 132 EUR.
  • Alstom : Stifel démarre le suivi à conserver en visant 23 EUR.
  • Amundi : Citigroup réduit son objectif de cours de 80 à 76 EUR.
  • BioArctic : RBC démarre le suivi à surperformance en visant 230 SEK.
  • BMW : Berenberg passe de conserver à acheter en visant 110 EUR.
  • DBV Technologies : Goldman Sachs passe d'acheter un neutre en visant trois euros.
  • EQT : Citigroup passe de vendre à neutre en visant 260 SEK.
  • Fresenius : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 39 EUR.
  • GlaxoSmithKline : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 1700 à 1850 GBp.
  • Henkel : Société Générale passe d'acheter à conserver en visant 66 EUR.
  • Renault : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 62 à 27 EUR.
  • Schroders : Citigroup passe de neutre à achat en visant 2900 GBp.
  • Shop Apotheke : Barclays reprend le suivi à surpondérer en visant 138 EUR.
  • Stadler Rail : Stifel démarre le suivi à l'achat en visant 44 CHF.
  • Stellantis : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 21 EUR.
  • Swedish Match : J.P. Morgan passe de souspondérer à neutre en visant 81 SEK.
  • Volkswagen : Berenberg passe de vendre à conserver en visant 175 EUR.
  • Zur Rose : Barclays reprend le suivi à surpondérer en visant 178 CHF.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Airbus a enregistré 98 commandes au mois d'avril.
  • Vinci Construction remporte un contrat de 255 M€ en Australie.
  • Capgemini va fournir des services d'informatique dématérialisée à Airbus.
  • Geely Automobile Holdings va acquérir 34,02 % des actions de Renault Korea Motors auprès de Renault. Le groupe annonce par ailleurs la transformation de sa financière captive RCI Bank en "Mobilize", qui proposera du financement et de la location automobile.
  • Veolia vend à Saur ses activités dans les services mobiles de l'eau en Europe pour 190 M€.
  • Le plan d'actionnariat de Sopra Steria attire un employé sur trois.
  • JCDecaux signe un contrat de mobilier urbain à Dresde.
  • Maurel a pu faire remonter un peu la production à Ezanga.
  • Quantum Genomics annonce la fin du recrutement des patients de l’étude pivot de Phase III, FRESH.
  • Trigano, Lacroix, Nyxoah ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Résultats des sociétés

  • Bayer : l'Ebitda du premier trimestre a dépassé les attentes.
  • Munich Re : le réassureur va prendre une charge de près de 700 M€ sur la Russie.
  • Sony : le résultat opérationnel trimestriel est un peu court. Le groupe va racheter 2% d'actions supplémentaires.

Annonces importantes (et autres)

Lectures