Milan (awp/afp) - Affectée par l'impact économique de l'épidémie de coronavirus, l'Italie a vu son déficit public dépasser le seuil symbolique des 10% du PIB au deuxième trimestre, un chiffre vertigineux qui témoigne de l'année difficile que la péninsule traverse, avec sa pire récession depuis la Seconde Guerre mondiale.

Alors qu'il s'était élevé à 0% au deuxième trimestre 2019, le déficit a atteint 10,3%, après 9,8% sur les trois premiers mois de l'année.

La cause? A la fois "la forte réduction des recettes du fait de la baisse de l'activité économique" en raison des strictes mesures de confinement prises de mars à mai, et du ralentissement du commerce mondial. Mais aussi "l'augmentation substantielle des dépenses liées aux mesures de soutien mises en place" par le gouvernement en faveur des entreprises et salariés en difficulté, a expliqué l'Institut national des statistiques (Istat) dans un communiqué.

Ce chiffre préfigure ce que sera l'ensemble de 2020 pour la troisième économie de la zone euro.

Premier pays touché par l'épidémie de coronavirus en Europe en février, l'Italie prévoit une hausse de son déficit public à 10,8% du PIB cette année, selon le nouveau projet de loi de finances qui doit être adopté lundi soir et dont les médias italiens se sont fait l'écho.

Un chiffre à comparer aux 1,6% enregistrés l'an passé et aux 2,2% sur lesquels Rome tablait avant l'éclatement de la pandémie.

L'Union européenne a suspendu cette année les règles de discipline budgétaire, une mesure inédite prise en raison de l'impact désastreux de la pandémie.

Le déficit public italien doit ensuite redescendre à 7% l'an prochain, puis à 4,7% en 2022 et 3% en 2023, a précisé jeudi le ministre de l'Economie, Roberto Gualtieri, devant des parlementaires.

La péninsule, où la pandémie a fait quelque 36.000 morts, connaîtra cette année sa pire récession depuis la Seconde Guerre mondiale.

"Grand pacte"

Selon le projet de loi de finances, Rome table sur un plongeon de 9% de son Produit intérieur brut (PIB) (contre -8% estimé en avril), avant un rebond l'année suivante, à +6%.

Mais d'autres organisations sont plus pessimistes, comme l'OCDE qui prévoit une chute de 10,5% du PIB italien cette année ou la Commission européenne (-11,2%).

Du côté de la dette publique, les chiffres sont là aussi vertigineux: elle atteindra 158% cette année, contre 134,8% en 2019 et 2018, qui constituait déjà le deuxième ratio plus élevé dans la zone euro, derrière la Grèce, d'après les nouvelles prévisions du gouvernement.

L'Italie compte lancer un vaste plan pour relancer son économie, déjà affectée en 2012-2013 par une dure récession, après avoir été plombée par la crise de la dette et des plans d'austérité à la chaîne.

Avec 208,6 milliards d'euros de subventions et prêts, la péninsule est le principal bénéficiaire du plan de relance européen de 750 milliards d'euros adopté cet été par les dirigeants de l'UE pour faire face à la pandémie.

Modernisation du pays, transition écologique, inclusion et parité sont les trois grandes priorités définies par Rome.

Le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte a ainsi indiqué que comme le souhaite Bruxelles, au moins 37% des ressources seraient allouées à des investissements "verts", c'est-à-dire "la transition énergétique dans des secteurs stratégiques comme l'automobile, la lutte contre l'instabilité hydrogéologique ou l'efficacité énergétique des bâtiments publics".

Le président de la principale organisation patronale italienne, la Confindustria, a appelé à dessiner "un grand pacte pour l'Italie", qui soit "visionnaire".

"Si l'on se trompe sur la façon de dépenser les 209 milliards d'euros de l'Europe (...) les dommages sur le pays seront immenses. Nous ne pouvons pas nous permettre d'échouer", a affirmé Carlo Bonomi.

Il a invité à s'inspirer du plan France Relance, avec des choix "courageux" pour améliorer l'égalité hommes-femmes, la formation des jeunes, la productivité et mettre en oeuvre une véritable réforme fiscale.

Il a aussi critiqué les multiples aides adoptées pendant la pandémie, en estimant que l'Italie ne pouvait et ne devait pas "devenir un +assistanatland+".

afp/jh