Les Bourses européennes ont terminé une nouvelle fois en nette baisse vendredi, alors qu'elles étaient parvenues la veille à conjurer une correction qui les plombe elles et leurs homologues américaines dans un contexte d'incertitudes croissantes autour du buget italien, des velléités protectionnistes nourries par le contentieux commercial sino-américain ou encore du resserrement monétaire de la Réserve fédérale.

Un contexte macroéconomique difficile qui n'est pas rattrapé par une microéconomie qui ferait meilleure figure dans la mesure où des résultats de poids lourds européens et américains, high techs notamment dans ce dernier cas, n'ont pas répondu aux attentes.

Trois éléments pèsent globalement sur les sociétés européennes: hausse des coûts avec les matières premières et les charges salariales, nouveaux droits de douane et ralentissement de la croissance en Chine.

Des analystes inquiets revoient ainsi leurs prévisions de résultats pour l'indice MSCI Europe à un rythme inégalé depuis février 2016.

À Paris, le CAC 40 a terminé sur une perte de 1,29% à 4.967,37 points. Le Footsie britannique a cédé 0,92% et le Dax allemand 0,94%.

L'indice EuroStoxx 50 a perdu 0,93%, le FTSEurofirst 300 0,81% et le Stoxx 600 0,77%.

Sur l'ensemble de la semaine, le CAC accuse une perte de 2,31%, tandis que le Stoxx 600 lâche 2,46%.

L'indice mondial MSCI, qui suit les actions de 47 pays, recule de 1,40%. Il est en recul de plus de 14% sur son record de clôture du 26 janvier.

"Les espoirs pour les résultats des sociétés américaines sont très élevés, donc, à chaques fois qu'ils ne sont pas exaucés, la punition est sévère", dit Miraji Otman (BayernLB), faisant référence à la déception causée par les résultats trimestriels d'Alphabet et d'Amazon publiés la veille.

"On est habitué à de gros chiffres, 18% de croissance du chiffre d'affaires, 25%, etc... Les valorisations sont devenues vraiment ambitieuses", ajoute-t-il.

VALEURS

Les grands indices sectoriels européens sont tous dans le rouge. Parmi eux, celui de l'automobile perd près de 1%, plombé par la chute de Valeo, lanterne rouge et de loin des indices CAC 40 et Stoxx 600 avec un décrochage de 21,02%.

L'équipementier a lancé un nouvel avertissement sur ses prévisions 2018 à cause des perturbations provoquées dans la production des constructeurs par les nouvelles normes d'homologation WLTP et du ralentissement brutal du marché automobile chinois, dont l'impact risque de perdurer sur la fin de l'année.

A WALL STREET

Les indices boursiers américains suivent la même tendance qu'en Europe, en particulier le Nasdaq, plombé par Alphabet et surtout Amazon, au lendemain de la publication de résultats jugés décevants de la part du géant du commerce en ligne et du moteur de recherche sur internet.

Vedettes de Wall Street ces dernières années, les valeurs technologiques souffrent déjà depuis le début du mois de la volatilité sur les marchés actions, certains investisseurs redoutant la fin d'un cycle haussier de dix ans.

Amazon perd 2,8% et Alphabet 3,11% une demi-heure à peu près après la clôture des places européennes.

LES INDICATEURS DU JOUR

Ils offrent une image contrastée de la situation économique, tant en Europe qu'aux Etats-Unis.

La croissance de l'économie des Etats-Unis a ralenti moins que prévu au troisième trimestre, la baisse des exportations de soja liée aux droits de douane ayant été en partie compensée par des dépenses de consommation au plus haut depuis près de quatre ans et par un bond des investissements dans les stocks.

Si le moral des ménages allemands reste stable à l'approche du mois de novembre et leur propension à consommer a encore augmenté, leurs anticipations sur l'économie et sur leur revenu se dégradent, tandis que le moral des ménages américain s'est lui un peu altéré ce mois-ci et que celui des ménages français s'est à peine amélioré.

En France encore, les prix à la production ont augmenté de 0,3% en septembre, ralentissant légèrement après une hausse révisée à 0,4% en août.

CHANGES

Le dollar a inscrit un pic de deux mois de 96,860 contre une panier de devises de référence, en réaction au ralentissement moins notable que prévu du PIB américain au troisième trimestre.

Mais il cédait 0,17% à mi-séance.

Le PIB a crû de 3,5% annualisés mais le protectionnisme du président Donald Trump a retranché 1,8 point à la croissance, observe Greg Anderson (BMO Capital Markets).

L'échange d'amabilités douanières entre Washington et Pékin a bénéficié au dollar, qui recouvre son statut de monnaie refuge en période de volatilité et de turbulences géopolitiques. Le marché prend également pour hypothèse que l'économie américaine sera moins touchée que ses partenaires commerciaux par une guerre commerciale, ce qui à son tour soutient le dollar.

Cela étant, un dollar fort renchérit les exportations. Mais il diminue aussi le coût des importations et la résultante tend à être neutre.

Le yen et le franc suisse sont aussi deux monnaies refuges recherchées en période troublée, tandis que l'euro lui est tombé à un plus bas de 10 semaines de 1,133 dollar, le président de la BCE Mario Draghi ayant du mal à convaincre les cambistes que la Banque centrale européenne pourra normaliser sa politique monétaire suivant le calendrier prévu.

L'euro s'est toutefois repris et prenait 0,07% à 1,1382 dollar.

TAUX

Le rendement de l'emprunt à 10 ans allemand a touché un plus bas de sept semaines de 0,343%, en raison des interrogations sur le budget italien et des résultats décevants des géants américains de la technologie qui conduisent les investisseurs vers des actifs plus sûrs.

Le rendement est par la suite remonté à 0,359%, en recul sur le taux de 0,40% de la veille.

Les rendements de la zone euro tutoyaient déjà des niveaux planchers jeudi, après que Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE), eut admis qu'il y avait une perte d'élan de la croissance et bien des incertitudes pour l'avenir.

Après la réunion de la BCE, le marché monétaire a repoussé à décembre 2019, au lieu d'octobre, son anticipation d'une hausse de taux de 10 points de base.

Le rendement à 10 ans américain fléchit encore à 3,0774% contre 3,136% jeudi soir. Il avait touché mercredi un plus bas de trois semaines de 3,09%.

PÉTROLE

Les cours du brut reculent et s'acheminent vers leur troisième semaine consécutive de baisse après les déclarations du gouverneur saoudien à l'Opep, qui estime que le marché du pétrole pourrait basculer vers une offre excédentaire au quatrième trimestre de l'année en raison de la hausse des stocks et du ralentissement de la demande.

Le Brent de mer du Nord a touché un plus bas de 75,77 dollars le baril et est bien parti pour une perte hebdomadaire de plus de 4%. Il a perdu plus de 10 dollars en trois semaines.

La perte hebdomadaire du brut léger américain (WTI) tournerait elle autour de 4%.

(Édité par Marc Joanny)