PARIS (awp/afp) - Impassibles face aux incertitudes sur les conditions du Brexit, les marchés européens devraient cependant rester vigilants la semaine prochaine quant à la tournure que pourraient prendre à la fois le dossier sino-américain sur le commerce et la conjoncture mondiale.

"Le flux de nouvelles sur le Brexit n'a pas fait bouger les marchés", ayant "plus un impact psychologique" qu'économique en Europe, commente auprès de l'AFP Régis Bégué, directeur de la gestion actions chez Lazard Frères Gestion.

Même la Bourse de Londres a traversé la semaine sans encombre, l'indice vedette s'affichant en hausse malgré une livre sterling qui a fait preuve d'une grande volatilité. Les milieux d'affaires, qui craignaient par-dessus tout un Brexit sans accord, sont in fine rassurés.

Les députés ont de manière cinglante rejeté une nouvelle fois l'accord de Brexit porté par la Première ministre Theresa May mais, sans surprise, ils se sont par la suite opposés au scénario d'un divorce sans accord et ont validé un report de la sortie de l'UE.

Le Brexit va encore dominer l'agenda politique la semaine prochaine, puisque Theresa May a promis de soumettre au Parlement son accord une troisième fois, d'ici à mercredi. S'il est accepté, la date du Brexit sera repoussée jusqu'au 30 juin; s'il ne l'est pas, le report ira au-delà de cette date.

Possible tension sur les marchés

Concrètement, "rien n'a été décidé en fait" et il demeure une "interrogation sur la longueur de cette expansion", ce qui "risque de maintenir un peu de tension", et "un peu de volatilité" prochainement sur les marchés, observe Marjorie Sonigo, directrice de la gestion financière chez Pictet Wealth Management.

Le report inattendu à début avril de la rencontre entre Trump et son homologue chinois Xi Jinping, initialement prévue avant fin mars, devrait, lui aussi, "mettre un peu de tension sur les marchés", prévoit-elle.

Une chose est sûre, toutefois: "l'accord sino-américain va revenir sur le devant de la scène", selon elle. "Le marché pense qu'il y aura un accord, mais quand ?".

Donald Trump a de nouveau exprimé jeudi son optimisme sur un futur accord commercial avec la Chine, précisant s'attendre à une décision d'ici trois à quatre semaines. Perçue comme une bonne intention envers les Etats-Unis, Pékin a adopté vendredi une loi censée garantir un traitement équitable aux investisseurs étrangers en Chine.

"Le degré de probabilité d'un accord entre la Chine et les Etats-Unis sera le point central qui continuera de faire bouger le marché", confirme M. Bégué.

Si les Bourses européennes sont bien orientées depuis le début de l'année, elles sont surtout en rééquilibrage après la chute de fin 2018 jugée excessive et injustifiée par les fondamentaux économiques.

Pour l'heure, le paradoxe est déconcertant: "le marché est stimulé par des taux d'intérêt bas sans pour autant être très optimiste sur la conjoncture", observe M. Bégué.

"Le marché paraît être immunisé contre tous les risques", constate de son côté Mme Sonigo, que ce soit le tableau économique morose, marqué par une croissance révisée à la baisse en zone euro ou l'essoufflement en Chine, que Pékin s'efforce d'endiguer par des mesures de relance. Sans oublier une "décélération des bénéfices".

Mais, prévient-elle, "la moindre nouvelle peut envoyer le marché dans un sens ou dans l'autre". "L'environnement peut du jour au lendemain redevenir anxiogène" et "les chiffres macroéconomiques vont donner un peu le ton".

Dans ce contexte d'incertitudes et de décélération de la croissance, "les investisseurs restent prudents et conservent une certaine aversion au risque", note M. Bégué.

D'autant qu'ils gardent en tête, selon lui, un scénario consensuel d'une "entrée probable en récession des Etats-Unis fin 2020" après dix ans de croissance continue et un taux de chômage au plus bas.

Il devront attendre la fin de la semaine pour examiner les indicateurs avancés, précurseurs de tendance (PMI américains et européens vendredi) et la confiance des consommateurs en zone euro (jeudi) pour mars.

La banque centrale américaine (Fed), quant à elle, tiendra une réunion de politique monétaire mardi et mercredi.

A Francfort, ce jour-là, le marché sera attentif aux résultats annuels du groupe automobile BMW avant les réunions de conseil de surveillance jeudi chez Deutsche Bank et Commerzbank, au moment où il est fait état de discussions préliminaires entre les deux banques en vue d'un rapprochement.

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