Lisbonne (awp/afp) - Frappé de plein fouet par la troisième vague de l'épidémie de coronavirus et soumis à un nouveau confinement strict, le Portugal s'inquiète pour la reprise de sa filière touristique, moteur d'une économie qui a connu en 2020 une récession historique de 7,6%.

L'an dernier, les exportations de biens et services ont chuté de 18,6%, contre une hausse de 3,9% en 2019, en raison surtout d'un "effondrement sans précédent du tourisme", a indiqué vendredi l'Institut national des statistiques, qui a revu à la baisse la croissance du produit intérieur brut (PIB) au dernier trimestre 2020 (+0,2% en variation trimestrielle, et -6,1% sur un an).

"La situation reste très incertaine et imprévisible", a commenté à l'AFP l'économiste Pedro Braz Teixeira, directeur du cabinet d'études du Forum pour la compétitivité, une association proche du patronat.

"Le troisième trimestre de l'année sera décisif, mais il dépend de plusieurs facteurs: l'évolution de la pandémie, l'avancée de la campagne de vaccination et la situation sanitaire des pays dont sont originaires les touristes", explique-t-il.

Le tourisme, qui représente plus de 10% du PIB portugais, a connu une année 2020 catastrophique qui a contribué à une récession sans précédent depuis l'avènement de la démocratie en 1974.

Malgré une légère reprise l'été dernier, grâce au marché domestique, le Portugal a perdu en 2020 trois quarts des touristes étrangers qu'il avait accueilli l'année précédente. Au total, le secteur hôtelier a hébergé 10,5 millions de personnes, après un record de 27 millions en 2019.

Confinement jusqu'à Pâques

Les professionnels du secteur espèrent une reprise en 2021, mais le début de la saison semble déjà compromis, puisque le confinement général imposé depuis la mi-janvier pourrait durer jusqu'à Pâques.

"En janvier et février l'activité touristique a été quasiment nulle, à Pâques il n'y aura pas de touristes et l'été dépendra du programme de vaccinations, mais étant donné le retard de livraison des doses, la situation s'annonce compliquée", a résumé le secrétaire général de la Confédération du tourisme, Antonio Abrantes.

"Nous ressources financières sont épuisées", désespère le mouvement "Sauver le tourisme", créé par de petits opérateurs de la filière, dans une lettre adressée cette semaine au gouvernement pour réclamer des aides "à fonds perdus".

L'exécutif socialiste, qui tablait cette année sur une croissance de 5,4% tirée par une relance du tourisme, a déjà reconnu qu'il devra revoir ses prévisions à la baisse.

"Une autre saison touristique faible retardera une reprise complète du secteur" qui pourrait être reportée "à 2022 et peut-être au-delà", a prévenu l'agence de notation financière DBRS dans une note d'analyse publiée début février.

Vaccination des Britanniques

"L'un des espoirs pour le secteur repose sur le programme de vaccination des Britanniques", note l'économiste Joao Duque, professeur de l'Institut supérieur d'économie et de gestion à Lisbonne.

Premier marché touristique du Portugal, la Grande-Bretagne, où plus de 18,6 millions de personnes ont déjà reçu une dose de vaccin contre le Covid-19, vise un retour à la quasi normale pour l'été.

"Si le Portugal parvient à redonner confiance, c'est plutôt bon signe pour le tourisme", relève M. Duque alors que les vols en provenance du Royaume-Uni restent pour l'instant suspendus en dépit d'une amélioration de la situation sanitaire.

Pour favoriser la reprise du tourisme, l'île de Madère, région portugaise qui en dépend particulièrement, a décidé d'ouvrir totalement l'accès aux touristes en mesure de prouver qu'ils ont été vaccinés ou qu'ils se sont rétablis du Covid au cours des trois derniers mois.

Autre bouée de sauvetage en perspective, le plan de relance européen prévoit 13,9 milliards d'euros à fonds perdus pour le Portugal, que le pays espère toucher dès le début de l'été.

"Ces aides devraient aller massivement vers le tourisme", qui a un effet levier pour l'ensemble de l'économie, a défendu récemment le président de l'agence pour la promotion du tourisme dans la région nord du pays, Luis Pedro Martins.

afp/rp