Zurich (awp/ats) - Trois Allemands inculpés d'espionnage économique comparaissent depuis mardi devant le tribunal de district de Zurich. Ils sont accusés d'avoir dérobé des documents à la banque privée J. Safra Sarasin pour les remettre à la justice allemande.

Les trois prévenus sont un avocat de Stuttgart et deux anciens employés de la banque J. Safra Sarasin. Cette affaire est liée à la plainte déposée par le droguiste et milliardaire allemand Erwin Franz Müller contre la banque privée qu'il accuse de l'avoir mal conseillé dans la gestion de sa fortune.

Les inculpés sont soupçonnés d'avoir fourni à la justice et aux autorités allemandes des documents concernant l'affaire opposant le milliardaire à la banque. En mai 2017, un tribunal d'Ulm (D) a jugé que le droguiste avait en effet été mal conseillé par la banque et qu'elle devait lui verser des dédommagements d'un montant de 45 millions d'euros. La banque a fait appel.

Documents confidentiels

Le droguiste a gagné ce procès grâce à son avocat qui était en possession de documents confidentiels de la banque privée. Un de ces documents concernait une expertise démontrant que J. Safra Sarasin avait effectivement mal conseillé le milliardaire dans un investissement dans le fonds Sheridan au Luxembourg, l'origine du scandale "Cum/Ex".

Appelés "Cum/Ex", les fonds d'optimisation fiscale mettent en oeuvre des opérations complexes permettant de demander deux fois le remboursement de l'impôt anticipé. qui n'ont en fait été versés qu'une seule fois. Le ministère allemand des finances a cessé ce type de remboursements en 2012, ce qui a provoqué l'écroulement du fonds Sheridan utilisé par le droguiste milliardaire.

Espionnage économique

L'avocat du droguiste, considéré par certains comme un lanceur d'alerte en Allemagne, figure parmi les prévenus qui sont jugés à Zurich. Le procureur requiert contre lui une peine de trois ans et demi de prison pour espionnage économique.

Les deux autres prévenus sont les informateurs de l'avocat, deux Allemands qui ont travaillé pour la banque privée. Ils sont accusés d'avoir transmis les documents confidentiels à l'avocat. Pour ses services, le principal informateur a reçu 1% de la somme perçue par le droguiste lors du procès à Ulm, soit 450'000 euros. Les deux informateurs ont ensuite partagé la somme.

Pour le procureur, il s'agit d'espionnage économique. Contre le principal informateur, il requiert 3 ans et 10 mois de prison. L'homme a passé six mois en détention préventive. Contre son complice, le Ministère public demande une peine de 3 ans de prison, dont une année ferme.

Requêtes de la défense

Au cours de la première audience, les avocats de la défense ont déposé plusieurs requêtes visant à annuler le procès ou à le reporter. Ils ont notamment demandé que l'instruction soit reprise depuis le début.

Ils estiment que le procureur n'est pas impartial et qu'il s'est rangé du côté de la banque J. Safra Sarasin dès le début de l'affaire. Pour le procureur, les choses sont claires: avec ces requêtes, la défense tente d'éviter le procès. Le tribunal a rejeté ses requêtes.

Le procès devrait durer deux jours. La prochaine audience est fixée à jeudi. La date du jugement n'est pas connue.

ats/rp