Ce papier étant un peu plus long que les autres, il me semblait nécessaire d'y placer une table des matières pour aider le lecteur à s'y retrouver.

Table des matières :

I. D'où vient le Bêta et que représente-t-il ?

  1. L’analyste financier ne s’embête pas trop
  2. Les fluctuations
  3. Le risque de marché et le risque spécifique

II. Calcul et interprétation du Bêta 

  1. Le calcul
  2. Interprétation du Bêta

III. Utilisation du Bêta 

  1. La gestion de portefeuille
  2. L’évaluation financière
  3. Calcul du coût du capital par la méthode indirecte
  4. Calcul du coût du capital par la méthode directe

IV. Les limites du Bêta


I. D'où vient le Bêta et que représente-t-il ?

L’analyste financier ne s’embête pas trop

Le risque d’un titre boursier peut avoir plusieurs origines. Il peut s’agir d’un risque économique, structurel, politique, pandémique ou encore d’un risque financier. On pourrait citer le risque de liquidité, de solvabilité, le fait que les revenus d’une entreprise proviennent d’un seul client, les risques de taux etc. Des risques que l’on retrouve généralement détaillés dans le document de référence d’une société mais qui ne portent pas directement sur les flux de l’entreprise. Ils sont propres à l’environnement dans lequel celle-ci évolue.

Table des matières du document d'enregistrement universel de Saint-Gobain
Table des matières du document d'enregistrement universel de Saint-Gobain

Pour caractériser le risque, le gestionnaire de portefeuille ne s’embête pas trop. Il ne s’intéresse pas particulièrement à la nature du risque mais plutôt au potentiel impact de l’ensemble des risques sur la fluctuation du cours d’une valeur.

Les fluctuations

L’analyse des fluctuations du cours d’un titre montre qu’elles peuvent s’expliquer soit par la fluctuation de l’ensemble d’un marché financier soit par des facteurs propres au titre, qui n’affectent pas le marché dans sa globalité. 

A titre d’exemple, le genre d’événement qui peut impacter le marché dans son ensemble peut être une baisse inattendue des taux d’intérêts, la croissance d’une économie plus forte que prévu, un niveau de chômage plus faible que les estimations… 

Vous noterez que je suis toujours dans cette idée de surprise, j’utilise les expressions “inattendue”, “plus forte que prévu”, “plus faible que les estimations”, car rappelez-vous, les marchés anticipent ces facteurs et les cours de bourse intègrent déjà ces estimations. Seule une différence notable entre la publication et ce qui était attendu peut avoir un impact significatif sur le marché.

Concernant les facteurs propres à un titre, qui n’affectent pas le marché dans son ensemble, on peut citer la signature d’un contrat important, la faillite d’un concurrent, une nouvelle réglementation… Ce sont des événements qui vont concerner un nombre très restreint d’entités voir une seule et unique entreprise.

Le risque de marché et le risque spécifique

Ces deux sources de fluctuations donnent naissance à deux types de risque : le risque de marché et le risque spécifique, que l’on appelle aussi “risque intrinsèque”.. Le risque de marché affecte donc l’ensemble des titres financiers mais pas forcément avec la même intensité. Le risque spécifique est quant à lui caractéristique d’une valeur et c’est donc ce risque que l’on peut atténuer par le biais de la diversification. En ayant un nombre plus important de valeurs dans son portefeuille, on se protège d'un évènement qui affecterait uniquement l’une d'entre elles car son poids est moins significatif.

Lorsque l’on investit au travers d’ETF indiciels par exemple, c’est ce risque spécifique qu’on essaie de diluer. 

Il est plus difficile de se défaire du risque de marché. Pour apprécier son effet sur le cours de bourse d’une action, on utilise le Bêta. Ce Bêta caractérise la sensibilité du titre aux fluctuations de son marché, il traduit l’intensité de la corrélation entre l’action et son indice de référence.

On peut alors résumer l’ensemble de ce qui vient d’être dit par un graphique :

Raisonnement de l'analyse dans l'interprétation des risques
Raisonnement de l'analyse dans l'interprétation des risques

II. Calcul et interprétation du Bêta 

Le calcul

Du fait que le Bêta représente la relation entre l’évolution du cours d’une valeur et l’évolution du cours de l’indice du marché, il convient, pour l’appréhender, d’utiliser une régression linéaire entre les rentabilités périodiques du marché et les rentabilités périodiques du titre boursier. Le Bêta est donc propre à chaque titre et dépend aussi bien de l’indice choisi que de la périodicité utilisée pour tracer les différents points avant de réaliser notre régression. 

Dans la pratique, on place sur l’axe des abscisses la rentabilité du marché et sur l’axe des ordonnées la rentabilité du titre, et cela pour chaque période. On obtient alors un nuage de points dans lequel nous pouvons, à l’aide du tableur Excel, tracer une droite de régression. Le Bêta est le coefficient directeur de cette droite. On notera que plus la dispersion des points autour de cette droite est chaotique, moins la valeur du Bêta a de sens statistique. On peut évaluer la pertinence de la régression et sa capacité de prédiction à l’aide du coefficient R².
Expression de la rentabilité périodique d'un titre en fonction de celle du marché. Une expression linéaire faisant apparaître le Bêta
Expression de la rentabilité d'un titre en fonction de celle du marché. Expression linéaire faisant apparaître le Bêta (coefficient directeur)

Voici quelques exemples de calcul du Bêta pour l’action Apple Inc :

Calculs du Bêta de Apple Inc avec différents paramètres
Calculs du Bêta de Apple Inc avec différents paramètres (Cliquez pour agrandir)

A titre d’exemple, on note que le Bêta d'Apple Inc est de 1,29 lorsque que l’on se réfère au S&P500 sur l’année 2021 en période hebdomadaire, tandis que sur une plus longue échelle de temps (2014-2021), celui-ci est de 1,08. Cet exemple met en avant le fait que le Bêta est très sensible aux paramètres choisis (indice et périodicité) et qu'il peut fortement varier en fonction du domaine d'étude.

Pour les moins à l’aise d’entre-vous, pas de panique, vous pouvez aussi calculer la valeur du Bêta en saisissant la formule suivante dans une case de votre feuille Excel. Dans ce cas, pas besoin de régression, il vous suffit simplement de renseigner les variations de rentabilité du marché dans une colonne et celles de l’actif dans une autre puis de choisir une cellule dans laquelle renseigner la formule suivante :

Calcul du Bêta avec les formules Excel
Formule à saisir pour calculer le Bêta à l'aide du tableau Excel

Interprétation du Bêta

Si Bêta est de signe positif, cela signifie que l’action analysée évolue généralement dans le même sens que son indice. À l’inverse, si le Bêta est de signe négatif, cela signifie que le titre a plutôt eu tendance à évoluer dans le sens opposé à son indice. La valeur absolue du Bêta doit ensuite être interprétée comme un multiplicateur de fluctuations. Si la valeur absolue du Bêta est inférieure à 1, cela signifie que le titre atténue les fluctuations du marché. Si elle est supérieure à 1, elle les amplifie d’un facteur égal à la valeur absolue du Bêta. 

À titre d’exemple, admettons que la société LVMH présente un Bêta de 1,2 par rapport au CAC40.  Il faut alors comprendre que lorsque le CAC 40 évolue de 1% à la hausse, le titre LVMH a historiquement tendance à suivre l’indice, avec une hausse de 1,2% sur la même période. Il est extrêmement important de se rappeler que les données utilisées pour calculer le Bêta sont des données historiques. À ce titre, sa valeur ne nous donne aucune information certaine pour le futur.

Avec ce que nous avons présenté jusqu’à maintenant, on a compris qu’il existe deux typologies de risque : le risque spécifique, dont on peut atténuer l’impact sur le portefeuille en se diversifiant et le risque de marché, que l’on peut « maîtriser » en veillant à sélectionner des valeurs dont le Bêta correspond à nos attentes (atténuation des fluctuations, amplification des fluctuations, corrélation positive ou corrélation négative). 

III. Utilisation du Bêta 

La gestion de portefeuille

Le Bêta donne donc à l’analyste une information sur la sensibilité ou la volatilité historique du titre boursier qu’il observe. Il peut alors arbitrer ses positions en considérant cette information et cela l’amène à construire un portefeuille censé lui permettre d’atténuer le risque de marché. Lors de période de forte volatilité, il peut être raisonnable de se tourner vers des Low Beta Stocks, c'est-à-dire des actions présentant un Bêta dont la valeur absolue est proche de 0.

Dans cette idée, S&P a désigné l’indice Low Beta Global Index dont la stratégie est d’identifier les 100 titres du S&P500 avec le Bêta le plus faible (c’est à dire compris dans le dernier quintile).

Evolution du cours du Low Beta Global Index (blanc), du S&P500 (bleu) et du VIX Index (jaune)
Evolution du cours du Low Beta Global Index (blanc), du S&P500 (bleu) et du VIX Index (jaune)

Le Bêta peut donc être utilisé dans un objectif de gestion de portefeuille. Cependant, si telle est la démarche suivie par un investisseur, celui-ci ne prend pas en compte la corrélation entre l’évolution du cours des titres qu’il analyse. Il tronque simplement une liste d’actions en fonction de leur Bêta. Or, il est possible que sa démarche soit considérée contre-productive pour d’autres investisseurs avisés, car les titres qu’il sélectionne partagent désormais tous la même caractéristique (celle d’avoir un Bêta faible) et cela va donc à l’encontre du principe de diversification. En effet, il y a de très grandes chances qu’un portefeuille Low Bêta soit majoritairement composé de valeurs évoluant dans des secteurs très défensifs.

Dans une logique d’optimisation de portefeuille, il existe d’autres méthodes qui permettent d’obtenir des résultats tout aussi intéressants. Calculer la variance d’un portefeuille (qui prend en compte la covariance entre les titres et donc la corrélation de ces derniers entre eux) et minimiser celle-ci en déterminant le poids optimal de chaque position pour un rendement cible est une méthode très connue (théorie moderne du portefeuille, qui a donné naissance au MEDAF) qui permet entre autres de tracer la frontière efficiente d’un portefeuille et ainsi éliminer des compositions qui ne sont pas optimales.

Calcul de la frontière efficiente d'un portefeuille de 4 positions selon la théorie moderne du portefeuille
Calcul de la frontière efficiente d'un portefeuille de 4 positions selon la théorie moderne du portefeuille

D’autres ETF, tel que celui de MSCI : le MSCI World Minimum Volatility reposent sur ce type de méthodes plus complexes mais qui reposent sur un nombre considérable d’hypothèses qui ne sont pas vérifiées dans la réalité.

Performance des indices MSCI World Minimum Volatility (USD) et MSCI World
Performance des indices MSCI World Minimum Volatility (USD) et MSCI World

Les analystes financiers sont loin d’être les seuls à se servir des méthodes d’optimisation. Certains ingénieurs en bureau d’étude les utilisent quotidiennement, pour dimensionner une poutre par exemple. Ils vont minimiser la masse et le coût de celle-ci tout en s’assurant qu’elle résiste aux contraintes qu’y vont lui être appliquées. Ils vont alors jouer sur les matériaux et dimensions de la poutre pour satisfaire les contraintes et objectifs. La grosse différence entre l’analyste financier et l’ingénieur, c’est que le second est quasiment certain que deux poutres de même dimension et issues d’un même matériau ont de très grandes chances de se comporter de manière identique. Son étude a donc un sens. Il peut faire confiance aux abaques et résultats des tests de traction qui ont été effectués sur le matériau en question. L’analyste financier a quant à lui absolument rien qui lui garantit que parce que le cours d’une action a évolué d’une telle manière il continuera à le faire par la suite.

Enfin, une autre méthode pour caractériser le risque repose sur le calcul du ratio de Sharpe. Il permet de comparer différents placements en fonction de leurs couples rendement/risque. Il est relativement simple à déterminer et permet de tenir compte du placement sans risque. A noter qu’il est préférable de calculer l’écart-type sur les variations de cours et non sur le cours directement. Ce ratio peut lui aussi être largement commenté, son créateur l'a d'ailleurs lui même critiqué à plusieurs reprise. Nous reviendrons sur ce point en fin d'article.

Ratio de Sharpe 2021 de plusieurs indices
Ratio de Sharpe 2021 de plusieurs indices

L’évaluation financière

Au-delà de la gestion de portefeuille, le Bêta est aussi utilisé en évaluation financière. Il intervient dans le calcul du Coût moyen pondéré du capital (WACC : Weighted Average Cost of Capital) dont les analystes se servent pour actualiser les flux futurs qu’une entreprise prévoit de générer. La somme des flux futurs actualisés par un WACC pertinent permet aux analystes d’avoir une idée de la valeur intrinsèque d’une action (Méthode DCF : Discounted Cash Flow). 

Profitons-en pour ouvrir une parenthèse sur le coût du capital.

Calcul du coût du capital par la méthode indirecte

Le coût moyen pondéré du capital d’une entreprise, qui représente la moyenne des taux de rentabilité attendue par les actionnaires et les prêteurs, pondérés par la proportion des capitaux propres et de la dette dans le passif de l’entreprise, est lié à l’actif économique de celle-ci.

Formule indirecte du CMPC (Coût Moyen Pondéré du Capital))
Formule indirecte du CMPC (Coût Moyen Pondéré du Capital)

Il est très important de comprendre qu’en dépit des variables qui interviennent dans son calcul, il n’est pas fixé en fonction de la structure financière de la société mais bien du risque lié à l’actif économique. Pour une entreprise, le choix de la structure du capital intervient dans un second temps, une fois que le coût moyen du capital est déterminé. 

En effet, les investisseurs et prêteurs exigent une rémunération différente en fonction de la nature de l’activité de l’entreprise, les actifs qu’ils vont devoir financer et la région dans laquelle la société opère. À titre d’exemple, les pourvoyeurs de fonds d’un laboratoire de recherche pharmaceutique vont attendre un rendement bien supérieur à ceux qui mettent des fonds à disposition d’une boulangerie.

Exemple simplifié pour comprendre le CMPC et son influence sur le choix de la structure du capital (et pas l'inverse !)
Exemple simplifié pour comprendre le CMPC et son influence sur le choix de la structure du capital (et pas l'inverse !)

Dans les deux exemples ci-dessus, on s’émancipe du facteur (1-IS) qui permet de prendre en compte le fait que les charges financières liées à la dette sont déductibles des impôts. Cela permet de simplifier un peu les choses. Vous comprenez alors que dans le cas où l’entreprise se finance uniquement par capitaux propres, le coût des capitaux propres est égal au coût moyen pondéré du capital (fixé arbitrairement à 7% pour la boulangerie et 20% pour le laboratoire). Si l’entreprise choisit de se financer avec un peu de dettes, la rémunération attendue par les actionnaires grimpe, un constat logique au vu du nouveau risque structurel de l’entreprise. On peut alors déterminer le coût de la dette correspondante. 

Le WACC est donc aussi bien le taux de rentabilité moyen exigé par les acteurs qui mettent les fonds à disposition de l’entreprise, que le taux de rentabilité minimum que l’actif économique doit dégager pour que l’entreprise se développe et que les entités qui l’a finance continuent de le faire.

On se souviendra tout de même que les prêteurs s’approprient les flux avant les actionnaires et que les risques relatifs au bon fonctionnement de l’entreprise pèsent beaucoup plus sur l’actionnaire que sur les prêteurs. Cela permet d’expliquer le coût plus important des capitaux propres vis-à-vis de la dette. On comprend aussi que plus une entreprise est endettée, plus le taux de rentabilité des capitaux propres est élevé car les investisseurs prennent plus de risques. Inversement, plus les capitaux propres occupent une place importante dans le passif, plus le coût de la dette sera faible car les prêteurs prennent moins de risques. Toutes les variables qui interviennent dans le calcul du WACC sont donc interdépendantes et la structure financière doit être réfléchie une fois le taux de rentabilité attendu évalué. 

A ce propos, du fait que la valorisation d’un titre dépend du taux de rentabilité exigé par les pourvoyeurs de fonds dans un contexte financier défini, vous comprenez à quel point comparer les niveaux de valorisation d’indices et de titres à deux époques différentes sans tenir compte du contexte de financement des entreprises n’a pas de sens. Un rendement de 20% en 2021 se paie beaucoup plus cher qu’un rendement de 20% dans les années 70.

Vous vous demandez alors ce que vient faire le Bêta là-dedans ? Le Bêta intervient dans le calcul du coût des capitaux propres qui traduit donc le rendement attendu par les actionnaires, facteur essentiel dans le calcul du WACC. Dans une logique où l’investisseur compare toujours différentes opportunités entre-elles, l’utilisation du Bêta prend tout son sens et permet de simplifier grandement les choses.

Le coût des capitaux propres se calcule de la façon suivante :

Expression du coût des capitaux propres Kcp
Expression du coût des capitaux propres Kcp

Le principe est relativement simple, on ajoute au rendement sans risque Rf une prime de risque qui désigne le supplément de rendement exigé par un investisseur afin de compenser le niveau de risque supérieur du marché auquel il s’intéresse vis-à-vis d’un placement sans risque. Cette prime de risque se matérialise donc par la différence entre la rentabilité du marché et la rentabilité d’un rendement sans risque. Cette prime est donc commune à toutes les valeurs d’un même marché. Cependant, dans le calcul du taux de rentabilité exigé par l’actionnaire, qui est propre à un titre, on multiplie cette prime par le Bêta du titre en question. La présence du Bêta dans le calcul du coût des capitaux propres est donc essentielle pour prendre en compte la volatilité du titre. Un investisseur attendra d’une action caractérisée par un Bêta de 2 une rentabilité bien supérieure qu’une action dont le Bêta est de 1.

À titre d'exemple, nous pouvons calculer le taux de rentabilité qui aurait dû être exigé par les actionnaires pour un investissement dans la société Apple courant 2021. Sur l’année, le S&P a réalisé une performance de 28,59%, le titre Apple Inc a un Bêta de 1,29 (vu plus haut dans l’article) et le rendement sans risque (US 10 years bonds) était de 1,4% en fin d’année (dans ce cas-ci, prendre le rendement de début d’année aurait été plus logique).

Kcp de Apple Inc sur l'année 2021

Il est tout à fait logique que le rendement attendu soit supérieur à la performance du S&P 500 du fait que le rendement sans risque soit positif et que le Bêta du titre Apple Inc ait un Bêta supérieur à 1 et donc présente un profil plus risqué (amplification des fluctuations du marché).

Calcul du coût du capital par la méthode directe

Estimer le WACC d’une entreprise et être en mesure d’argumenter les décisions prises pour chaque variable n’est pas une mince affaire, d’autant plus que nous avons vu que ces variables sont interdépendantes et que le bon analyste financier est censé raisonner en valeur et non en poste comptable (il doit prendre la valeur de marché de Vcp et Vd et non la valeur comptable inscrite dans le bilan). 

Certains analystes utilisent alors une méthode de calcul directe du WACC qui simplifie grandement les choses.

Expression du CMPC par la méthode directe (utilisant le Bêta économique)
Expression du CMPC par la méthode directe (utilisant le Bêta économique)

Pour calculer le coût du capital, on peut utiliser une formule qui nous rappelle beaucoup celle du coût des capitaux propres, à la différence que le Bêta utilisé n’est pas identique. Il s’agit ici du Bêta économique, qui permet d’ajuster le Bêta (celui qui représente le risque de volatilité lié à la valorisation des capitaux propres sur les marchés) avec le poids de la dette de l’entreprise. Au-delà de Bêta économique, on l’appelle aussi Bêta désendetté.

Expression du Bêta économique (Bêta désendetté)
Expression du Bêta économique (Bêta désendetté)

On comprend alors que le Bêta économique est plus faible que le Bêta, ce qui est tout à fait normal puisque l’on prend en compte la dette et que l’on ne calcul pas ici le coût des capitaux propres, mais bien le coût du capital total.  

Sachez que ce Bêta désendetté est aussi largement utilisé pour déterminer le coût du capital des entreprises qui ne sont pas coté en Bourse. Les analystes calculent d’abord le Bêta d’entreprises cotées dont l’activité économique est très proche de la société étudiée puis ajuste ce dernier pour neutraliser les différences de structures financières entre les entreprises dont le capital est ouvert au public et l’entreprise privé analysée.

IV. Les limites du Bêta

Au travers de cet article, j’ose espérer que vous avez appris beaucoup de choses au sujet du Bêta, cependant, avec les nombreuses parenthèses que j’ai ouvertes au cours de la rédaction, vous avez eu l’occasion d’appréhender les limites de son utilisation.

La plupart des calculs sur lesquels reposent la gestion de portefeuille et l’évaluation financière relèvent du vaste monde des statistiques. Il est très important de garder un regard critique sur ce que vous utilisez et de toujours vous appuyer sur un nombre significatif d’observations (de données). Pour autant, si vous remontez trop loin dans les historiques, il y a de fortes chances que le titre que vous êtes en train d’étudier n’a plus rien à voir avec le titre actuel tant le monde de l’entreprise change rapidement. Vous comprenez alors que l’analyse financière est à mi-chemin entre les sciences et l’art et aussi que la vulgarisation excessive est aussi bien votre meilleure amie que votre pire ennemie. Soyez toujours en mesure d’argumenter vos décisions et n’ayez jamais peur d’aller « un peu plus loin ».

L’ensemble de ces concepts reposent essentiellement sur des données historiques et les résultats obtenus peuvent fortement varier lors que l’on modifie celles-ci (sensibilité importante). Pour ces différentes raisons (et bien d’autres), un certain nombre d’analystes se refusent d’utiliser le Bêta ou les modèles traditionnels d’évaluation financière comme le MEDAF, jugeant qu’ils sont déconnectés de la réalité des marchés, reposent sur un trop grand nombre d'hypothèses et permettent seulement de comprendre ce qui a le mieux marché l’année dernière (chose que tout le monde est en mesure de faire). Le ratio de Sharpe doit lui aussi être utilisé avec précautions, plusieurs portefeuilles ayant le même ratio peuvent présenter des profils bien différents. De manière générale, le fait d'utiliser la variance pour caractériser le risque peut être largement commenté. Aujourd'hui, beaucoup estiment à juste titre que le comportement humain et la psychologie d’investissement peuvent représenter un risque bien plus important, qui vient balayer l’ensemble de ces concepts autour de la volatilité.

Pour autant, vous présenter ces théories traditionnelles me semble essentiel car c’est à vous de juger de leur pertinence. Lorsqu’elles sont entre de bonnes mains, ils peuvent permettre de tirer des conclusions intéressantes.

Sources principales : Le Vernimmen / Bnains.org