New York (awp/afp) - Les cours des céréales ont enregistré un petit sursaut en début de semaine, aidés par des achats chinois et des prises de bénéfices des spéculateurs, mais le marché reste morose faute de développement majeur.

Maïs européen et américain se sont redressés mardi après être tombés, lundi, à leur plus bas niveau depuis près de trois ans et demi.

"On a su, en début de semaine, que la Chine était un petit peu revenue aux achats", a expliqué Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage.

Selon le site spécialisé Fastmarkets, des acheteurs de la République populaire se sont portés acquéreurs d'orge français, australien et ukrainien.

Ils ont aussi passé commande de maïs ukrainien, tandis que des agriculteurs américains ont placé 123.000 tonnes de soja vers une destination inconnue, dont plusieurs analystes avancent qu'il s'agit, là aussi, de la Chine.

"La Chine ne vient qu'à des moments décisifs, où elle estime que c'est un bon niveau (de prix) pour acheter", souligne Damien Vercambre. "Ca va peut-être empêcher le marché de décaler (baisser) davantage."

"Cela montre qu'ils ont encore de l'appétit", commente Dax Wedemeyer, d'US Commodities.

Le marché a aussi bénéficié de prises de bénéfices de fonds d'investissement et d'acteurs spéculatifs, encouragés par la faiblesse des cours, mais aussi par l'approche de la fin du mois de février, selon l'analyste.

Le rapport hebdomadaire du régulateur américain des marchés à terme, la CFTC, avait montré, vendredi, que les paris à la baisse sur le maïs américain étaient proches d'un niveau record.

Arrivée d'un front froid

Aux Etats-Unis, le blé a aussi été poussé par l'arrivée prévue d'un front froid dans une partie du Midwest et des plaines, selon Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Insights.

"Les températures des dernières semaines, au-dessus des normales saisonnières, ont accéléré la maturation et la sortie de l'état dormant", détaille l'analyste, une phase appelée tallage.

Les cultures sont, dès lors, "très vulnérables à une chute de température", qui pourrait endommager une partie de la récolte, prévient Michael Zuzolo.

Mais, hormis cet épisode américain, les conditions météorologiques restent relativement favorables dans les grandes régions de production du monde, même si les précipitations pourraient être insuffisantes au Brésil et trop abondantes en France.

Avant la prochaine récolte, les stocks restent conséquents et le marché dicté par les acheteurs, avec notamment des prix russes qui ont encore baissé pour le blé.

"Il n'y a pas de gros potentiel de hausse" des cours, selon Damien Vercambre, car la concurrence va rester rude.

"Jusqu'ici, les rebonds ont, à chaque fois, été suivis d'un nouveau repli", rappelle Arlan Suderman, de StoneX. "Sur le plan des fondamentaux, il n'y a rien de solide à ce stade."

Les opérateurs ne se sont pas émus des déclarations du président ukrainien Volodymyr Zelensky qui a averti, lors d'un entretien à la chaîne CNN dimanche, que faute d'une nouvelle aide américaine, le corridor maritime était menacé.

Risques ignorés

Signe que ce dispositif continue de surprendre par son efficacité, le ministère américain de l'Agriculture (USDA) a récemment relevé de plusieurs millions de tonnes ses prévisions d'exportations ukrainiennes de blé et de maïs.

"Le marché ne prête plus attention aux problèmes potentiels de transport depuis l'Ukraine", estime Arlan Suderman. "La menace est pourtant plus importante aujourd'hui, mais tant qu'il ne se sera rien passé, (les opérateurs) ne réagiront pas."

Les incidents en mer Rouge, qui ont poussé de nombreux armateurs à contourner l'Afrique par l'ouest, ou la sécheresse qui a amputé d'un tiers le trafic au canal de Panama, n'ont pas plus soutenu les prix.

"C'est presque plutôt baissier (pour les cours des céréales), parce que si le (coût du) fret est plus important, le niveau FOB (hors frais de transport) doit baisser", fait valoir Damien Vercambre.

Pour Dax Wedemeyer, aucun jalon susceptible de sortir les cours de leur marasme n'est attendu à court terme.

Mais, dit-il, "ce serait surprenant de voir ce positionnement massif (des spéculateurs) à la baisse perdurer lorsqu'on approchera des prévisions" de répartition des surfaces cultivées (assolement) aux Etats-Unis, fin mars, qui devraient constituer un tournant pour les marchés agricoles.

afp/jh